La neige tombe en silences de grenades
J’ai cherché dans la nuit un signe de Dieu
Soudain une vague immense s’est levée au-dessus de l’église
Elle a dévoré chaque mur,
Emmené chaque homme,
Chaque rêve qui dormait,
Elle a submergé mon âme, mais je suis restée debout
Alors que ma ville s’évanouissait dans l’oubli marin.
Tu me parlais de vivre, de hanter la réalité
Comme des ombres raisonnables aux désirs étrangers,
Tu disais que la musique se travaille nuit et jour
Avec l’assiduité d’un pianiste évoluant dans les ors artificiels du music-hall,
Que la poésie ne se lit qu’une fois, qu’elle est de circonstance,
Et que les couleurs ne noient l’âme qu’à la lumière blanche
Dans un musée rachitique devant un chef d’œuvre vernis
Moi n’avais que des idées en tête et je fermais les yeux
Pour ne pas entendre le violon de la vérité,
Pour continuer à voir dans la neige un lac de sang,
Un val rimbaldien, une orange bleue comme l’été
Pour ne pas oublier mes nuits sanctifiées par les couleurs du rêve
En imaginant qu’après l’hiver,
Après la vague d’illusions embrassant la rigidité de la ville,
Les ruines de l’église me révèleraient un secret,
Que l’âme de la cité noyée me prendrait dans son poing
Et m’emmènerait loin du monde, près de ton ombre blanche
Danser avec toi dans un impossible silence de grenades