La trasianka (mélange entre Biélorussien et une autre langue) s’entendait dans l’amphithéâtre
J’ai enroulé mes mains autour du cou d’un nuage
J’ai joué jusqu’à tomber d’épuisement dans les bras de la nuit
A quoi bon écrire de la poésie —
Un lambeau du Ziazda (l’étoile / journal biélorussien) dans une flaque
Les artistes agitent les fantômes de la poésie
On entend nos applaudissements jusqu’en Lituanie
Les étoiles tombent sur un dramaturge ivre mort
Le soleil rouge s’est levé et a brûlé mon costume
Je cours dans Minsk épuisé par les battements de cils de la nuit
Ma réputation, je l’ai lancée comme un filet de pêcheur
Elle a crevé la glace du fleuve blanc comme une roche lourde
J’ai arraché un arbuste enfiévré par la beauté de ses fleurs
L’Evangile de Laurychauski sous l’aisselle,
J’ai claqué des doigts pour faire rappliquer la nuit,
Et les Dieux m’ont jeté une corde pour me pendre,
Dont j’ai retiré chaque fil pour les tisser au rouet
Et me faire une écharpe pour me protéger d’un avenir sans toi
Le froid giclait sur mes yeux comme un geyser d’argent
La poésie avait quitté Minsk, le ciel tremblait de peur,
Il a bien fallu applaudir les acteurs dans leur sublime hallucination
Il a fallu se lever, et voir partir chaque spectateur
Mais je continue ma route à travers les décombres et la neige
L’avenir ressemble à une course à travers le blizzard
Ma main en visière, je cherche l’or du siècle derrière un rideau de pluie,
Je cherche la passion sur les étendues de glace
Demain, le soleil percera à travers notre fenêtre,
Nous rejouerons l’espoir, nous tendrons encore nos mains
Vers le ciel observateur qui nous lance les épines de ses roses
Nous chanterons un cantique avant de nous évanouir par amour
Le temps viendra cristalliser l’Eternité, un lac bleu
Surgira dans la ville comme un ciel de purgatoire ; le feu
Hantera nos yeux longtemps devant les pluies d’obus
Et l’ombre de nos courages salira nos serments
L’église de Kaloja s’est tue, le monastère de Bieltchytski
A attendu longtemps avant de rouvrir ses portes ;
J’errais comme un enfant à la recherche de fantômes
J’avais pour toute épée une roche aiguisée par mes doigts usés,
Que j’ai plongée dans le temps en me rappelant le Théâtre,
La pièce que nous jouions pour survivre en temps de guerre
J’ai noyé longtemps mes pensées dans l’eau de ma mémoire
Le château de Niasvij éclate encore d’un rire assassin