Des centaines d’îles inhabitées
Ibrahim Nasir (président des Maldives) prend un thé blanc
Avec six chiens noirs
La conserverie de Felivaru sous la pluie

Les évangiles abandonnés sur la plage
J’ai tracé une croix de feu sur l’océan
L’île de Kaashidhoo fond dans le brouillard,
Tu as ramassé des coquillages

Tu as tracé ton nom sur le sable
Pour que je ne l’oublie pas,
Comme une tarikh (histoire) gravée dans la roche
En un million de grains de sable

Du dhivehi (langue des Maldives) écrit sur des feuillets de cuivre
La neige tombe sur l’océan
J’ai cherché mon lôbi (amour) dans le défilé des nuages
Ma main n’a serré que de la vapeur d’eau

Et l’iru (le soleil) tangue, et la terre se trouble,
Et je pose mille questions à la nuit
Elle ne me répond qu’en faisant clignoter ses yeux d’or
Les étoiles sont ma seule récompense

Il faut que ce daturu (voyage) dure mille ans
Pour que tu te retournes un jour sur ma silhouette d’ombre
Il était une fois un mîhâ (homme), une tombe, la mer
Et la nuit qui engloutit les souvenirs comme une vague ténébreuse

Un rukek’ (cocotier) chuchote une histoire triste,
Le majilis (parlement) a fermé ses portes
Les plages sont remuées par le vent d’ouest
Et mon cœur est une plage de sable fin

Les mois vont s’effilocher comme de la laine
La neige tombera sur nos cous brûlés par le soleil
Une prière retentira comme un bodu beru (tambour)
Dans la nuit transpercée par nos regards

La mer d’Arabie berce les atolls de l’ouest
La mer monte !
J’ai couru sur la plage à la recherche d’un fantôme
Il n’y avait personne, rien que la mer qui montait

Les chauves-souris au crépuscule
Ont écouté mon chant d’amour
Que la mer soit mon ziyarât’ (tombeau)
Et les coraux mes seuls souvenirs heureux

Si la marée m’emporte
Jetez des pétales de fleurs et un Coran dans les vagues
Et détachez ce bateau du ponton
Je veux que mon souvenir sombre au beau milieu de l’océan