Quand je partirai de chez moi
Le ciel n’aura pas bougé
Les oiseaux se tairont
Le rossignol qui a l’habitude des coups de vent
Ma forteresse dans l’ombre
Oscillera sous les mêmes orages

Le den-khep (couvre-lit) intact,
La petite chambre éclairée
Les rideaux de velours vert
Le kha (pointe) d’une lame
Des cheveux noirs coupés
Mes parents dorment
Je pars pour la g’angri (montagne au pic enneigé)
Repousser nos ennemis

J’ai revêtu le g’ô (costume d’homme)
Je suis une ombre bleue
Dans les rues des villages
Je vais cap (protéger) nos ancêtres
Le ciel se teinte de ‘ngü (argent)
La lune appelle de ses ‘ngou (vœux)
Les femmes sont parties ‘nga (couper l’herbe)
Et la châp (pluie) s’abat violemment
Sur mes rêves de pureté

Je me suis prosternée devant les étoiles
Elles qui veillent sur nos excentricités
J’ai ri en enfourchant mon cheval
La lune brillait de mille feux
Le chu (troupeau) paissait dans l’obscurité
Je suis le soldat le plus kukpa (fou), le mercenaire fiévreux
J’ai laissé ma peau de femme près du ruisseau
Et je galope sous la nacre du ciel
Ma peau est kön (blême) mes yeux brillants de rage

Le paysage fond sous les sabots de mon cheval,
La lam (route) sera longue, je ralentis
Je n’épouserai nul ‘mâp (mari)
La terre rouge sous mes bottes,
Je pars tuer le sä (prince) ennemi
Lui qui a assassiné mes frères
Et les couleurs du ciel changent
Les nuages prennent la forme de l’avenir
Les maisons disparaissent dans le brouillard
Mon sem (pouls) est rapide, ma respiration saccadée

Ma forteresse dans l’ombre
Le rossignol qui a l’habitude des coups de vent
Le kha (pointe) d’une lame
Des cheveux noirs coupés
Mes parents dorment
Je pars pour la g’angri (montagne au pic enneigé)
Repousser nos ennemis