Le fils de l’artchagar / Le fils du prêtre brahmane (Tamoul utilisé par les dalit + Français)

Dans la boue des rizières au milieu des étendues d’amarante,
L’incertitude git dans une flaque de soleil
Akka (grande sœur), tu vois l’homme là-bas dans le champ
Je vais lui demander de m’épouser !

L’eau de curcuma mélangée à la chaux a été versée à côté du bétel
J’ai fait tourner le plateau de cuivre
Autour du visage de ma future belle-mère
Dans l’espoir qu’elle oublie la noirceur de mes cernes

Akka (grande sœur) cet homme me rend folle
Je pense à lui en jouant de l’arabchatti (tambour en demi-sphère de l’orchestre paria)
Evente-moi avec un rameau de figuier (utilisé pour les rites de mariages)
Que son père l’artchagar (prêtre brahmane) ne croise pas mon chemin

Je lui cracherai au visage, deï ! (interjection marquant le mépris)
Les tonnelles sont décorées avec des avarai (plante mauve ou blanche vivace)
Viens ma sœur, prends ma main, c’est la fête,
Vishnu s’est incarné dans ce corps sombre

Agenouillées sous le banyan (arbre caractéristique des campagnes indiennes)
Les fleurs rouges violacées d’une bauhinie
Sont tombées dans le lac en contrebas
Ayo ! (interjection marquant la surprise ou la pitié) ma sœur !

Tu le vois, il passe près de nous en fumant le bidi (cigarette)
Apprends-moi ce que tu sais du billi (type de magie noire)
Pour faire voler l’âme de cet homme jusqu’à moi
Il me regarde ! Moi dans mon demi-sari (vêtement des jeunes filles porté au-dessus d’une jupe longue)

Cet homme est l’empreinte de Dieu sur terre
Et je vais lui demander de partager ma vie et ma mort,
Akka (grande sœur), je crois bien que je l’aime,
Mais déjà une ribambelle d’enfants m’entoure,

Divali (fête des lumières) illumine le pays tamoul
Je me suis isolée auprès du jacquier pour penser au fils du prêtre
Le brahmane m’a dévisagée en appelant mon père « innada » (terme d’adresse d’un homme de haut statut envers un autre de statut plus bas, méprisant)
Ayo ! Mes larmes ont coloré le vent en nuances de désespoir

Mon cœur tient bon, demain nous chanterons les élala (chansons de repiquage du riz)
En priant pour nous marier pendant le mois d’avani (cinquième mois du calendrier tamoul)
Nous prierons dans le temple ombragé par les figuiers de pagode
Nous mâcherons les pétales d’hibiscus pour faire rougir nos joues

Akka (grande sœur) crois-moi, le ciel m’a parlé, demain nous dégusterons des jilebi (friandise de mariage)
Je vais demander au fils du brahmane de m’épouser
Kaliyugam (âge du désordre du monde) peut m’ensevelir sous ses vagues noires
Mes kammal (boucles d’oreilles) reflètent la nacre de ses yeux

Akka (grande sœur) demain tu m’offriras le kodi (sari du mariage)
Nous tracerons des komal (dessin auspicieux) avec la farine de riz
Je porterai le potteu (point au front porté par les femmes)
Tu me rendras visite dans notre village au bord de la mer,

Viens ma sœur, aide-moi ! Donne-moi une magudi (flûte du charmeur de serpent)
Que j’endorme l’âme du prêtre brahmane
Ce soir, je vais demander son fils en mariage,
Et la lune tremble pour moi

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