Les voisins n’ont rien entendu
Le ciel est resté calme
Aucun hélicoptère n’a volé
Ayti (« la mer dans les montagne ») s’endort
Un président est resté debout dans l’attente de la mort
Toute la nuit à boire du café
La porte a été fracassée
Les étoiles filantes allumaient le ciel
Le fantôme d’un flibustier
A tendu la main au Président
On entendait les commando hurler
En espagnol et en anglais
Ou gen timoun (tu as des enfants ?)
L’assassin a craché, sa salive rouge
Sur le tapis aux franges dorées
Un enfant déchire un carton dans une rue
Ki travay ou fe (quel est ton métier ?)
Je suis le président d’Haiti
Mon âme s’apprête à quitter mon corps
Le ciel bleuit sous les assauts des avions de chasse
M pa konprann byen, repete souple (Je ne comprends pas bien, tu peux répéter stp)
La nuit s’engouffre comme une voleuse dans l’appartement
Le vent déchire les espérances
Le coup de feu est parti vite
La forêt des pins d’Hispaniola
Accueille les fourgons blindés
Et le fantôme du président
S’est juché sur un faucon pèlerin
Il parcourt l’île des Caraïbe en chantant,
Les gamins jouent avec des cailloux
L’un d’eux a lancé une pierre dans le sable
Des pétales rouges se sont envolés dans le ciel
Ne te tonbe pou yon ayisien (je suis tombé amoureux d’une Haïtienne)
Son visage se reflète dans la nuit sage,
C’est la fille du Président, elle tremble,
Un fantôme l’escorte sur la montagne
Mwen damou ou (je t’aime beaucoup)
Emmène-moi loin des crimes politiques
Loin du vent sale, loin des tôles insalubres
Allons nous fondre dans les plis roses du crépuscule