Mon poème a un nom : Gulbahar Haitiwaji
Ma poésie a les larmes de la keche (nuit)
Amis venez ichmek (boire) à la coupe de mes mots tremblants
La terre se noie dans les regrets d’un vaste asman (ciel) sacrificiel
Mon amour, Dieu est-il le shuji (secrétaire) du diable ?
Je vois le poyiz (train) de l’histoire dérailler dans un feu d’incandescence brûlée
Mon poème a un nom : Gulbahar Haitiwaji
L’ivresse des mots s’arrête dans la commissure des lèvres du présent
Et chaque saet (heure) qui passe nous frappe comme une vague de mort
Mon amour, Dieu est-il le shuji (secrétaire) du diable ?
Je vois le kün (jour) se lever sur des blocs de vies saccagés par la honte bue
Le ciel en est témoin, en ce lieu l’eau croupit dans leurs regards
Mon poème a une couleur : Aq (blanc) ; comme l’irrespirabilité du silence
Comme l’inexistence de la voix de cette ayal (femme)
Qui hurle le présent dans le dos des mendiants de la justice
Mon poème a une couleur, mon poème est un espoir
Le noir brillant du lempung (confiture d’agar-agar) des beaux yeux de cette jeune femme
Quand elle souriait au ciel hier, quand elle dansait sous ce ciel impuni
Mon poème a une couleur, une odeur, un passé, un prénom
Le goût de la shoxla (tomate) en coulis bercés d’illusions luxuriantes
Les songes shamaliq (venteux) de la Chine broient les âmes qizil (rouge)
Il n’y a dans ces lignes qu’une pluie désertique d’effroi
Car notre pitié est soghuq (froide) et notre aveuglement un fer issiq (chaud)
C’était peut-être un düshembe (lundi)l’ayal (le femme) dont ce poème a pris le nom
Est descendue de l’avion enveloppée dans le gilete pare-balle de l’oubli
L‘ayrport bruissait, les feuilles d’automne, le tarmac insensible,
Des néons de saqchi (police) un éclat de voix Fransuz (français) – sa fille l’enlace ;
Gulbahar Haitiwaji : mon poème a un nom aujourd’hui
Ma poésie a un corps et une âme — et respire l’odeur fanée de l’espoir